Analyse juridique de l’application du droit à l’oubli de la convention Aeras

Le droit à l’oubli est un concept juridique qui fait débat depuis plusieurs années. Il s’agit de permettre à une personne ayant été confrontée à un événement particulier, tel qu’une maladie, de ne plus être systématiquement pénalisée par cette situation passée. La convention Aeras (s’Assurer et Emprunter avec un Risque Aggravé de Santé) est un dispositif français qui vise à faciliter l’accès au crédit et à l’assurance pour les personnes présentant un risque aggravé de santé. Dans cet article, nous analyserons les aspects juridiques liés à l’application du droit à l’oubli dans le cadre de la convention Aeras.

Le droit à l’oubli dans le contexte de la convention Aeras

La convention Aeras a été mise en place en 2007 pour faciliter l’accès des personnes présentant un risque aggravé de santé au crédit et à l’assurance. Elle est le fruit d’une concertation entre les pouvoirs publics, les professionnels du secteur bancaire et assurantiel, et les associations de patients et de consommateurs.

Dans ce contexte, le droit à l’oubli constitue une avancée majeure pour les personnes ayant été atteintes d’une maladie grave, comme le cancer. En effet, il permet aux anciens malades d’obtenir un crédit ou une assurance sans avoir à mentionner leur ancienne pathologie, dès lors qu’ils sont considérés comme étant guéris depuis un certain nombre d’années.

Le cadre juridique du droit à l’oubli

Le droit à l’oubli est encadré par la loi du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé, qui a modifié le Code des assurances et le Code de la consommation pour introduire cette notion. Il s’applique aux contrats d’assurance emprunteur souscrits dans le cadre d’un crédit immobilier, d’un crédit à la consommation ou d’un prêt professionnel.

Pour bénéficier du droit à l’oubli, l’ancien malade doit respecter certaines conditions, notamment :

  • Avoir été atteint d’une maladie grave (cancer, hépatite C, etc.) ;
  • Ne plus présenter de signe de cette maladie depuis un certain nombre d’années (généralement 10 ans, mais seulement 5 ans pour les cancers diagnostiqués avant l’âge de 18 ans) ;
  • Avoir respecté les protocoles et les traitements médicaux prescrits.

Ces conditions sont fixées par un référentiel des pathologies établi par les pouvoirs publics, en concertation avec les professionnels du secteur et les associations concernées. Ce référentiel est régulièrement mis à jour pour tenir compte des évolutions médicales et scientifiques.

Les limites de l’application du droit à l’oubli

Toutefois, l’application du droit à l’oubli dans le cadre de la convention Aeras présente certaines limites. En effet, il n’est pas systématiquement accordé aux anciens malades :

  • Le dispositif ne s’applique qu’aux contrats d’assurance emprunteur, et non aux assurances santé, prévoyance ou dépendance ;
  • Certaines pathologies, notamment les maladies chroniques, ne sont pas concernées par le droit à l’oubli ;
  • L’ancien malade doit toujours répondre avec sincérité aux questions posées par l’assureur lors de la souscription du contrat, même si elles portent sur sa situation médicale passée.

De plus, le droit à l’oubli ne garantit pas une totale égalité entre les anciens malades et les autres emprunteurs. En effet, même s’ils ne sont plus tenus de mentionner leur ancienne pathologie, les anciens malades peuvent se voir appliquer des tarifs majorés ou des exclusions de garanties en fonction de leur état de santé actuel. Cette situation peut être perçue comme discriminatoire et remettre en question l’effectivité du droit à l’oubli pour certaines personnes.

Perspectives d’évolution du droit à l’oubli dans la convention Aeras

Afin d’améliorer l’accès au crédit et à l’assurance pour les personnes présentant un risque aggravé de santé, plusieurs pistes d’évolution sont envisageables pour le droit à l’oubli :

  • Elargir le champ d’application du dispositif aux autres types d’assurances, comme les assurances santé, prévoyance ou dépendance ;
  • Inclure davantage de pathologies dans le référentiel des maladies concernées par le droit à l’oubli, notamment certaines maladies chroniques ;
  • Renforcer la transparence et la communication autour du droit à l’oubli, afin que les anciens malades soient mieux informés de leurs droits et des démarches à effectuer.

En conclusion, le droit à l’oubli constitue une avancée importante pour les personnes ayant été atteintes d’une maladie grave dans le cadre de la convention Aeras. Cependant, son application reste perfectible et pourrait être étendue à d’autres types d’assurances ou de pathologies. Il est essentiel de poursuivre la réflexion sur ce sujet afin de garantir une meilleure égalité des chances pour tous les emprunteurs, quel que soit leur passé médical.